En son temps, le PLM avait attaché une grande importance à l’expédition sur Paris des primeurs de la vallée du Rhône, le défi étant de retarder autant que possible l’heure des envois tout en assurant une arrivée appropriée dans la capitale pour que les produits puissent être présents sur les étals des Halles de Paris aux aurores. La SNCF avait bien entendu poursuivi dans cette voie et multiplié les trains spéciaux, avec pour fleuron la Flèche des Halles qui, au début des années 1950, reliait Avignon à Paris-Bercy en un peu plus de onze heures (départ 11 h, arrivée 22 h 15). Mais, tout comme son aînée, elle se heurtait à la concurrence croissante de la route, avantagée par l’absence de toute contrainte horaire et rupture de charge. Et bien qu’ayant permis un gain d’une heure environ (employée à retarder d’autant le départ), l’électrification de l’artère impériale jusqu’à Avignon en 1959 n’avait pas suffi à enrayer l’érosion. Il était évident pour tous que seule une réduction substantielle des temps de parcours était susceptible d’inverser le mouvement. Pour y parvenir, il fut décidé de concentrer tout le trafic en provenance des différentes gares expéditrices – Tarascon, Châteaurenard, Cavaillon, Carpentras – sur un centre unique : Orange. Le bénéfice escompté (trente minutes) n’étant pas à la hauteur de l’ambition, la SNCF s’attacha dans le même temps à améliorer les conditions de l’acheminement proprement dit en traçant entre Orange et Paris-Bercy une marche « messageries » aussi accélérée que possible avec le minimum d’arrêts et en mobilisant les matériels roulants les plus modernes. Ainsi naquit le Provence-Express. Substitué à la Flèche des Halles le 27 mars 1961, il était reconnaissable aux pancartes nominatives fixées sur chacun de ses wagons (lettres vertes sur fond blanc). Circulant de mars-avril (démarrage de la campagne de printemps des primeurs) à novembre (fin de la campagne des raisins de table), il couvrait les 700 km qui séparaient Orange de Paris-Bercy en 8 h 13 à la vitesse moyenne de 85 km/h (rame de 40 à 50 wagons, soit 1 000 t, tractée par une 2D2), marquant un seul arrêt intermédiaire à Dijon-Ville (treize minutes) pour visite du matériel et échange du personnel de conduite (départ 14 h 27, arrivée 22 h 40). Cette organisation, qui permettait de retarder le départ des centres de production d’une heure et demie à deux heures, rendit au rail toute sa compétitivité, le tonnage transporté passant de 39 880 t en 1960 à 56 987 t en 1961. Un nouveau bénéfice de 53 minutes fut obtenu le 9 avril 1962 en portant la vitesse limite du train de 100 à 120 km/h. Le Provence-Express reliait désormais Orange à Paris- Bercy en 7 h 20, à la vitesse moyenne de 95 km/h (départ 15 h 20, arrivée 22 h 40). Il achemina en 1964 plus de 6 300 wagons (67 000 t).
Les TEEM
Initiée en 1955 par les CFF, la DB, la SNCB et la SNCF, l’idée de créer un réseau international de trains de marchandises accélérés pour lutter contre la concurrence de la route se concrétise le 28 mai 1961 par l’inauguration des premiers « Trans-Europ-Express-Marchandises » (TEEM) destinés à assurer le transport rapide en service international de certaines marchandises, notamment celui des denrées périssables, entre les principaux centres de productions et de consommation. Dix-huit administrations ferroviaires participent à cette organisation initialement centrée sur trente-deux relations, dont neuf intéressent directement la SNCF (notamment le trafic des primeurs entre l’Italie et l’Angleterre via Bâle et Dunkerque et des agrumes entre l’Espagne et l’Angleterre via Hendaye et Dunkerque). Les TEEM sont soumis à certaines règles : vitesse commerciale supérieure à 45 km/h, wagons aptes à 100 km/h, charge ne pouvant excéder 1 000 t, escales limitées au minimum, séjour aux gares frontières inférieur à deux heures. À titre d’exemple, le parcours Hendaye-Dunkerque (1 163 km) est franchi en 17 heures, soit à une vitesse commerciale voisine de 70 km/h.
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