Par Bruno Carrière
Issu en 1888 du rapprochement des « cirques » Barnum († 1891) et Bailey († 1906), The Greatest Show on Earth traverse l’Atlantique en novembre 1897 à bord du Massachusetts, vapeur de l’Atlantic Transport Line, compagnie de navigation américaine basée à Londres. Seuls les hommes de main, les animaux et les éléments constitutifs de l’entreprises font partie du voyage. Ne répondant pas aux critères techniques des chemins de fer britanniques du fait de leur large gabarit, les voitures et les wagons sont restés garés sur la côte Est des Etats-Unis. Aussi, l’une des priorités de James Anthony Bailey avait été de se procurer sur place le matériel roulant approprié, soit 67 unités commandées dès le mois de mars précédent aux ateliers de la WR Renshaw & Co (Phenix Works) établis à Stoke-on-Trent, Staffordshire. Livrés d’avril à juillet 1898, ces voitures (une partie des sleeping cars sont utilisées pour la première fois entre Birmingham et Leicester dans la nuit du 4 au 5 juin) et wagons permettent au cirque de sillonner le Royaume-Uni pendant deux ans (la totalité des matériels roule ensemble le 16 juillet au départ de Glasgow pour Edimbourg).
A l’hiver 1899-1900, ceux-ci font leur retour à Stoke-on-Trent pour une révision complète avant leur transfert sur le vieux continent, depuis les quais de Tilbury à Londres jusqu’à ceux du port de Hambourg en Allemagne. Assuré fin mars par le vapeur Michigan, troisième du nom, autre unité de l’Atlantic Transport Line, le franchissement de la mer du Nord exige deux voyages. Garés sur deux ponts, voitures et wagons partagent l’espace disponible avec la ménagerie. Après plusieurs représentations sur place (du 13 avril au 13 mai 1900), le Greatest Show amorce une longue tournée à travers l’Allemagne (avec notamment des étapes en Alsace-Lorraine à Metz, Strasbourg et Colmar), l’Autriche-Hongrie, les Pays-Bas et la Belgique[1]. Après un dernier spectacle tenu à Mons le 17 novembre 1901, la troupe embarque pour Paris.
Paris, où, au printemps de 1901, James Anthony Bailey se rend en personne avec pour ambition de dénicher une structure susceptible d’abriter son spectacle pour l’hiver. Son choix se porte sur la Galerie des Machines, immense halle de 420 m de longueur, 145 m de largeur et 45 m de hauteur érigée au Champ-de-Mars pour les besoins de l’Exposition universelle de 1889. La Salle des Fêtes aménagée dans sa partie centrale en 1900 militait en faveur de sa décision. En effet, cette « verrue » faite de staff et de peintures qui, par son gigantisme (elle pouvait recevoir plus de 12 000 personnes), n’avait pas apporté à l’Exposition du nouveau siècle les attentes placées en elle, offrait toutes les conditions pour abriter le cœur du Greatest Show. Rappelons que ce n’est pas la première fois que le cirque Barnum & Bailey trouve refuge dans ce type de construction. Lui ont précédemment ouvert leurs portes le Palais d’exposition « Olympia » de Londres inauguré en 1886 (du 27 décembre 1897 au 2 avril 1898) et la « Rotonde » de Vienne, pièce maîtresse du Palais de l’Industrie érigé dans le cadre de l’Exposition universelle de 1873 (du 25 novembre 1900 au 24 février 1901).
Prenant acte de sa proposition, le conseil municipal de Paris entérine, dans sa séance du 14 juin 1901, la location à J.A. Bailey de la Galerie des Machines « pour y installer des exhibitions et attractions diverses ». Le bail est conclu pour neuf mois, du 1er juillet 1901 au 1er avril 1902, moyennant 100 000 francs de loyer et 15 000 francs de patente. Sa décision lui attire les foudres des partisans de la démolition de la Galerie des Machines : « Nous sommes condamnés à voir à perpétuité les hideuses bâtisses qui déshonorent le Champ de Mars. » (La Petite République, 16 juin 1901). A l’inverse, elle satisfait ses défenseurs, notamment les élus de Saint-Maurice et de Maisons-Alfort qui militent pour sa conservation comme « partie intégrante de l’outillage industriel de Paris » et demandent qu’elle soit démontée et réédifiée au bois de Vincennes.
Dès le 1er juillet 1901, la Galerie des Machines est investie par une armée d’ouvriers de tous les corps de métier, avec pour mission de l’adapter aux besoins du cirque. Dans son édition du 6 novembre, Le Figaro rend compte du travail effectué : « Pour Paris, les administrateurs du cirque-ménagerie ne se sont pas contentés des tentes démontables qu’ils établissent en quelques heures dans les cités moins importantes que traverse leur agglomération acrobatique. L’ancienne Salle des Fêtes a été transformée en une salle de spectacle tout à fait confortable, décorée avec beaucoup de goût et qui peut contenir huit mille personnes assises. Une installation complète de chauffage à l’eau chaude[2] et d’éclairage électrique a été établie dans l’immense nef. Des écuries pour chevaux, un hangar spécial pour les "monstres" et "phénomènes", un autre pour la ménagerie, des loges d’artistes, des bureaux administratifs, des remises à voitures, des magasins de décors et d’accessoires ont été ménagés dans les deux halls latéraux. Tout cela flambant neuf, éclatant de couleur fraîche, fleurant bon le vernis et la sciure de bois… On n’attend plus que la troupe, qui circule en ce moment en Belgique. »
La Salle des Fêtes, entièrement réaménagée, est la pièce maîtresse des lieux : « Les sièges sont placés en amphithéâtre autour de l’immense salle. A mi-chemin des gradins, le cercle se trouve coupé par une longue bande circulaire de deux cents loges. Au centre se trouve l’arène destinée aux représentations. Elle comprend trois pistes dont chacune a quatorze mètres de diamètre. Entre ces pistes sont disposées des scènes où se produiront les jongleurs, équilibristes et acrobates. Et, tout autour, est un immense stade olympique [piste elliptique de 100 m de long] consacré aux courses de chevaux et de chars » (La Justice, 19 novembre 1901).
En prélude à la venue prochaine du cirque à Paris, J.A. Bailey invite la presse française à se transporter en Belgique pour assister à la représentation donnée à Courtrai le 15 novembre au soir. Ce jour, à midi, gare du Nord, les journalistes sont chaleureusement accueillis au pied d’un wagon-restaurant de la Compagnie internationale des wagons-lits par leur confrère René d’Hubert, ami personnel de J.A. Bailey et organisateur de l’événement, Tody Hamilton et Malden Ercole, respectivement responsable de la publicité et représentant en France du cirque Barnum. Parvenue en gare de Courtrai en début de soirée, la petite troupe est transportée par omnibus jusqu’au chapiteau, distant de trois kilomètres. Plus que le spectacle, c’est à la découverte des coulisses que les invités sont conviés, puis au démontage et à l’emballage progressif des diverses tentes et accessoires, et à leur transfert, concurremment à celui de la ménagerie, vers la gare où stationnent les trains spéciaux en partance pour Tournai, avant-dernière étape belge.
Les gravures (publiées par Le Journal dans son édition spéciale du 13 mars 1902) ont été réalisées à partir de photographies prises antérieurement.
La « voiture-publicité » (Advertising Car) – débarquement à Hambourg le 22 mars 1900;
« Une organisation modèle » s’enthousiasme l’envoyé spécial du Petit Parisien : « Dès qu’un numéro est terminé, les accessoires qui ont servi à l’artiste sont enlevés, roulés, emballés avec une rapidité qui tient du prodige. Sans cesse, pendant la représentation, on enlève des bagages, on charge des caisses, on évacue les tentes où le public ne passe plus. Les éléphants, qui faisaient tout à l’heure la joie de la foule, sont partis à la gare conduits par des cornacs dont ils portent gravement les lanternes et sont remplacés en piste par des chevaux valseurs. Les tentes accessoires sont abattues, pliées, roulées, alors que le spectacle dure encore dans la tente centrale. Et le cortège est extraordinaire de ces cent chariots, de ces soixante fourgons que traînent deux cent quarante chevaux de trait conduit sans le secours du fouet par des cochers graves comme des diplomates […]. L’embarquement des bagages est bien autre chose encore. Le cirque fait tout, sans secours étrangers, avec ses propres moyens ; d’Amérique, on a tout apporté : plans inclinés, trucs, wagons : il n’y manque que des locomotives[3]. Mais la Société Barnum et Bailey a déjà ses hommes d’équipe, ses chefs de train et même un chef de gare ! A une heure du matin, c’est-à-dire trois heures après la représentation, il ne restait pas un seul clou sur le terrain de 40 000 mètres carrés occupé par le personnel et le matériel du cirque Barnum. »
Novembre 1901-mars 1902 : hivernage parisien
Le cirque – précédé de son « wagon-réclame » arrivé depuis plusieurs jours – est attendu à Paris le 18 novembre au matin : « Il devait arriver lundi au lever du jour, et nous étions là une vingtaine de journalistes et de chefs de service du "show" qui, dès sept heures du matin, battions la semelle sur le terrain givré de la petite gare du Champ-de-Mars[4]. Mais le brouillard a fait des siennes et les quatre trains spéciaux ont éprouvés de grands retards » (Le Figaro, 19 novembre 1901). Le premier entre en gare à 7 h 55, le dernier vers 13 h 30. Les récits de leur déchargement, qui obéit à une suite d’opérations minutieusement établies, ne cadrent malheureusement pas avec la réalité, nous y reviendrons plus avant. Retenons pour l’heure l’ébahissement des curieux : « Et pendant quatre heures, par les rues de Grenelle, sous les yeux étonnés des habitants du quartier, a lieu le long défilé des roulottes contenant artistes, phénomènes, cuisines, aménagements, accessoires de cirque, bagages, matériel d’écurie, de couchage ou de salle à manger, costumes, oripeaux et harnais, se dirigeant vers le vaste logis où Barnum va prendre ses quartiers d’hiver » (Le Petit bleu de Paris, 20 novembre 1901), – sauf que, dans cet inventaire à la Prévert, notre chroniqueur a oublié l’essentiel : les animaux, notamment les éléphants ; et qu’ « avant midi, tout était transporté et logé à la Galerie des Machines » (Le Parisien, 19 novembre 1901).
La première a lieu le samedi 30 novembre au soir. De nombreuses notabilités venues de tous les horizons assistent au spectacle. On peut notamment apercevoir Pierre Waldeck-Rousseau, le président du Conseil, Alexandre Millerand, ministre du
Commerce, de l’Industrie et des Postes, Louis Lépine, préfet de police de Paris. Bien qu’officiellement invité, le président de la République, Emile Loubet, fait faux bond. La presse salue la qualité des numéros en termes dithyrambiques : « Le spectacle offert hier à Paris, par les managers incomparables Barnum et Bailey, fut un étonnement pour le Parisien sceptique, blasé, le Parisien qui a tout vu, tout connu, le Parisien qu’on n’épate pas : eh bien ! pour la première fois peut-être, le cirque américain de Barnum et Bailey a épaté Paris » (Gil Blas, 1er décembre 1901).
Les représentations se succèdent sans interruption jusqu’au dimanche 16 mars 1902, à raison d’une exhibition tous les soir (à 20 h 15) et d’une autre en matinée (à 14 h 00) les dimanches, mercredis, jeudis et jours fériés. Pour permettre la visite des écuries, de la ménagerie et des phénomènes, le cirque ouvre ses portes dès 12 h 30 et 18 h 30. Le prix des places s’échelonne de 1,50 francs (amphithéâtre) à 10 francs (loge).
Des arrangements sont faits avec les compagnies d’omnibus et de tramways pour assurer un service très ample, aussi bien pour se rendre aux représentations que pour en revenir. De son côté, la Compagnie des chemins de fer de l’Ouest met en circulation deux trains supplémentaires entre les Invalides (départs à 22 h 52 et 23 h 13), le Champs-de-Mars (départs à 23 h 01 et 23 h 22) et Paris-Saint-Lazare par l’avenue Henri-Martin (arrivées à 23h 24 et 23 h 45). Ces trains assurent la desserte des stations intermédiaires de Boulainvilliers, avenue Henri-Martin, Bois-de-Boulogne, Porte-Maillot, Courcelles et Batignolles. Ce service est supprimé le 17 mars 1902, au lendemain de la dernière représentation du cirque.
Le rideau tombé, la presse évoque déjà la tournée que Barnum & Bailey va entreprendre en province. Dans son édition du 17, Le Journal décide de consacrer quatre pleines pages au cirque : « Ce numéro contient une étude pittoresque illustrée sur la grande attraction BARNUM ET BAILEY, que tout Paris a admirée, et qui s’apprête dès aujourd’hui à visiter la province où l’attendent les plus grands succès. » Les vignettes qui illustrent notre travail sont issues pour l’essentiel de cette étude.
Le départ du cirque, gare du Champ-de Mars, est fixé au 23 mars au soir. Si l’évènement attire moins de curieux que lors de son arrivée, l’embarquement des animaux et des matériels n’en reste pas moins le reflet d’un savoir-faire exceptionnel inhabituel. C’est du moins le sentiment du journal Le Gaulois du 24 : « Il [le départ] était assez ignoré de la foule, car le long des palissades, il n’y avait guère qu’une triple rangée de badauds et pour la plupart venus du quartier […] Sur les quais, à part les gens du cirque, ne se trouvaient que de rares privilégiés : les hauts fonctionnaires de la Compagnie de l’Ouest, M. le marquis du Lau, administrateur ; M. Foulon, secrétaire général ; puis M. le vicomte Melchior de Vogüé, M. d’Ocagne, très intéressés par le spectacle qui, en effet, est unique. » Un point sur lequel revient le chroniqueur en conclusion : « … après avoir vu ce coin des Invalides [sic] transformé en campement de cow-boys, il nous apparaît que de toute l’exhibition Barnum, ce qui était le plus intéressant, c’est… son départ. »
Également présent sur les lieux est l’envoyé spécial du Temps, Joseph Galtier, chargé d’accompagner le cirque jusqu’à Lyon, sa première étape[5]. Si son ambition première est d’entrer dans l’intimité des « phénomènes », il a rapporté, dans son papier publié le 29 mars, quelques renseignement sur son périple à bord du train réservé aux artistes et aux personnels d’encadrement, ordinairement expédié en dernier : « Allez à Lyon en partant de la gare du Champ de Mars, dans un train américain, composé de voitures, fourgons et sleepings, construits en Angleterre, inscrit dans une gare allemande [Altona, près Hambourg] ; mettre deux heures pour arriver à Bercy, et quinze heures de Bercy à Lyon, voilà certes des circonstances qui ne sont pas ordinaires et qui suffiraient à rendre ce voyage peu banal. »
Un mot ici du devenir de la Galerie des Machines, passablement « écornée » par le passage du Greatest Show. Après avoir abrité de 1903 à 1909 l’ancêtre du Veld ’Hiv (piste en bois de 333 m de long sur 8 de large) et diverses expositions agricoles, il est démantelé en 1909-1910 afin de libérer la perspective du Champ de Mars.
Mars-octobre 1902 : tournée provinciale
Pour se transporter de ville en ville, The Greatest Show on Earth mobilise quatre trains, numérotés de 1 à 4 et se déplaçant dans cet ordre. Seules les locomotives sont fournies par les réseaux sollicités. Les matériels roulants appartiennent au cirque, construits en Angleterre comme dit plus haut.
Le parc, fort de 67 unités, se compose de :
8 voitures-lits (sleeping cars), compris la voiture-salon réservée à J.A. Bailey ;
1 voiture-réclame (advertising car) ;
35 wagons plats (flats cars) ;
16 wagons couverts avec ouvertures d’aération (stock cars) pour le transport des chevaux et autres quadrupèdes ;
6 wagons spéciaux, dont 1 à double pont pour le transport des poneys (double deck pony), 3 pour celui des éléphants (elephant cars), 1 autres pour celui des girafes (camel car), enfin 1 dernier dont n’avons pu déterminer l’usage (led stock car) ;
1 fourgon à bagages.
La particularité de ces voitures et wagons est d’obéir au gabarit anglais moins généreux en largeur et en hauteur que son homologue continental, inconvénient compensé cependant par une longueur alors inusitée en Europe (16 m hors attelage). Autre caractéristique, pour faciliter leur inscription en courbe, ils sont tous montés sur des bogies, ceux des wagons étant, au surplus, dotés de petites roues (2 pieds 1 pouce contre 3 pieds 1 pouce) afin d’augmenter la hauteur des caisses, subterfuge particulièrement utile pour le transport des éléphants et des girafes.
Les voitures pour éléphants (Elephant Cars)
Voitures et wagons sont bien entendu pourvus « des mécanismes les plus ingénieux, tels que freins pneumatiques [Westinghouse] et attelages brevetés » (Le Journal, 17 mars 1902), qui leur permettent de répondre aux exigences des administrations ferroviaires des pays traversés. En vérité, seule la voiture-réclame, qui précède l’arrivée du cirque de plusieurs jours, bénéficie d’un attelage et de tampons répondant aux normes européennes afin de pouvoir être intégrée aux rapides et express du service ordinaire. Les autres matériels sont dotés de l’attelage automatique mis au point par l’Américain Eli H. Janney. Caractérisé par l’absence de tampons, ce système fait qu’il est impossible aux locomotives de tracter les rames du cirque Barnum & Bailey sans le recours à un véhicule intermédiaire équipé à une extrémité de l’attelage européen (avec tampons) et à l’autre de l’attelage Janney. La littérature signale la présence de « fourgons courts » qui auraient servi de relais à cet effet, sans préciser toutefois leur appartenance.
Leur livrée criarde – jaune avec châssis vert pour les wagons, rouge pour les voitures-lits, blanche pour la voiture-réclame – suffisent à les démarquer des matériels communs. Pour ceux qui s’interrogeraient encore sur leur appartenance, l’inscription en lettres énormes « Barnum & Bailey » (lettrage rouge pour les wagons, or pour les voitures-lits) célèbre la gloire du plus grand cirque du monde. Ces matériels sont d’ailleurs un élément récurrent de sa publicité. Tracts et affiches ne manquent pas de les signaler comme partie intégrante du spectacle : « L’HIVER DERNIER A LA GALERIE DES MACHINES, PARIS. Cet ÉTÉ en tournée avec ses 68 wagons américains mesurant chacun 20 mètres de long et formant 4 trains spéciaux de 17 wagons » (encart publicitaire type destiné à la presse).
D’un poids avoisinant 200 tonnes, chacune des quatre rames (ou section selon la terminologie anglaise retenue par Barnum & Bailey) a une composition immuable. Les wagons sont numérotés en fonction de leur rame de rattachement et de leur place au sein de celle-ci. Chaque rame répond à une fonction précise. La première, formée de 12 wagons plats (chacun pouvant recevoir trois chariots-cages bâchés de feutre) et couverts, assure le transport de la ménagerie : fauves, éléphants et autres représentants de l’espèce animale. La seconde, forte de 16 wagons plats et couverts, porte une partie des éléments constitutifs du cirque (roulantes, forge, tentes) et de la cavalerie (160 chevaux d’hippodrome). La troisième rame, de 18 wagons, est l’élément clé de l’organisation : outre un complément en matériels divers sur wagons plats, elle achemine les wagons-écuries abritant les 120 chevaux de trait utilisés au déchargement des chariots et à leur transfert jusqu’au site désigné pour accueillir le cirque, ainsi que les wagons-dortoir dédiés aux 180 ouvriers d’exécution. La quatrième et dernière, de 16 unités, comprend des wagons plats, des wagons couverts (pour douze chameaux et 40 Pur-sang), les « sleeping cars » (pour les 300 artistes et personnel d’encadrement) et le salon-lits de J.A. Bailey.
Chaque ville désireuse d’être visitée par le Greatest Show doit au préalable s’entendre, loin en amont, avec les représentants du cirque sur les conditions de l’accueil, ce qui donne lieu parfois à d’âpres négociations. Il en est ainsi à Saint-Quentin où le cirque doit stationner les 23 et 24 septembre 1902. Entamés à la mi-juillet, les pourparlers sont presque aussitôt interrompus, le Bureau de bienfaisance local exigeant 6 % sur le montant des recettes, soit bien plus que le forfait de 1 000 francs proposé par le représentant de Bailey[6]. Soumise à la menace de déplacer les représentations vers une commune voisine, la municipalité finit par céder début août : elle renonce à demander le moindre droit de place pour l’occupation du Champ de manœuvres et obtient du Bureau de bienfaisance qu’il limite ses prétentions à 1 600 francs.
Quelques jours avant la venue de la caravane, le « wagon-réclame » du cirque se fait un devoir de rendre visite à l’heureuse élue. Stationné en gare, il sert de base aux opérations d’affichage, puis reprend sa route sans attendre l’arrivée du show. Sa livrée blanche, rehaussée d’inscriptions « en lettres d’or », contribue à sa notoriété, tout comme son aménagement intérieur : à l’une des extrémité, un cabinet de travail avec « tableaux, tapis, canapé, pupitre américain » ; de l’autre, un magasin-atelier abritant brosses, pinceaux, et « un grand chaudron pour la préparation de la colle de pâte » ; au centre, des casiers pour le rangement des affiches et autres documents publicitaires, surmontés de « lits-couchettes » pouvant accueillir jusqu’à vingt personnes.
Enfin, la veille ou l’avant-veille de l’arrivée de la caravane, contact est pris avec le chef de gare pour régler les détails du déchargement des quatre trains, notamment sur la désignation des voies répondant le mieux à cette opération. Sont exclues les voies à quai et à forte courbe : la priorité est donnée aux voies de garage suffisamment droites et longues pour recevoir les rames d’une longueur moyenne de 300 mètres. Si la nécessité de couper celles-ci s’impose, le représentant du cirque précise ses desiderata afin de parvenir aux meilleures combinaisons possibles : réunion sur une même voie des wagons-dortoirs, puis sur d’autres des wagons couverts et des wagons plats. Pour ces derniers, il faut au moins deux longueurs de voie de 175 et 200 mètres chacune, avec assez d’espace de chaque côté pour que les chevaux préposés au déchargement des chariots puissent passer dans un sens et dans l’autre sur toute leur longueur. Afin de permettre aux chariots à pied d’œuvre de franchir les voies si besoin est, il est également étudié l’établissement, en des endroits à déterminer en commun, de « passerelles » larges de 20 mètres, obtenues par la juxtaposition de traverses entre les files de rails. Les opérations visant le débarquement des différents matériels et animaux sont minutieusement exposées, tout retard pouvant remettre en cause la représentation de l’après-midi. Enfin, dans le cas d’un séjour prolongé, doit être déterminé avec soin l’emplacement des voies de garage, notamment celui des wagons-dortoirs qui doivent être d’un accès facile, le logement en ville des personnels et artistes restant limité à quelques-uns seulement.
Arrive le grand jour. Partis dans la nuit de leur précédente étape, les quatre trains se suivent à distance, toujours dans le même ordre. La presse locale se fait d’ailleurs un devoir de préciser l’heure de leur arrivée, tôt le matin. Si, dans l’ensemble, l’horaire est respecté – à Rennes, par exemple, les convois sont réceptionnés sans encombre à 1 h 30, 2 h 40, 3 h 20 et 4 h 12 –, la moindre anicroche peut avoir des répercussions dommageables. D’où l’exigence de la direction du cirque que chaque train soit accompagné d’un inspecteur de la compagnie responsable de l’acheminement, qui plus est « en tenue » (uniforme), pour pouvoir répondre des manquements aux engagements pris. Une précaution qu’elle juge nécessaire en raison des dépenses engagées, comme l’évoque le journal La Gironde en marge de l’arrivée du Greatest Show à Bordeaux : « Comme on pense, cette circulation représente de gros frais, d’autant que les propriétaires du cirque n’ont droit à aucune bonification pour la fourniture de leurs wagons spéciaux. Sur le réseau du Midi, pour parler de celui qui nous intéresse plus particulièrement, il est perçu une taxe de douze francs par kilomètre et par train, soit de Cette à Bordeaux – avec arrêts pour représentations à Narbonne, Perpignan, Béziers, Carcassonne, Castres, Albi, Toulouse, Montauban, Agen –, une somme d’environ 23 000 francs » (23 mai 1902). A Bordeaux, les trains, annoncés pour 1 h 34, 2h 34, 4 h 28 et 4 h 54 accusèrent des retards de plusieurs heures au départ d’Agen. Si le premier est aperçu à 4 h 00, le deuxième ne pointa son nez qu’à 7 h 45 et le troisième, précédant de quelques minutes le quatrième, à 13 h 00 seulement ! Ce qui conduisit à annuler la représentation du soir. A noter que la Compagnie du Midi ne fut en rien responsable de ce contretemps, lié à la difficulté qu’ont eu les chariots, une fois le spectacle clos à Agen, à rejoindre la gare en raison d’une voirie détrempée.
Comme à chaque fois, une foule nombreuse se presse aux abords de la gare bien avant leur arrivée, soucieuse d’assister aux opérations de débarquement annoncées comme un spectacle à part entière, au même titre que la parade le long des rues menant au site, le montage des tentes et les représentations à venir. Pas question néanmoins pour les curieux d’envahir les emprises ferroviaires fermement verrouillées par un service d’ordre assuré par des éléments de la force militaire locale. Seuls sont admis à approcher les rames quelques personnalités, journalistes et officiers de cuirassier et du train venus là tirer les enseignements susceptibles d’aider à l’accélération des opérations de débarquement/embarquement en cas de conflit.
Les opérations de débarquement en gare
Premier chargé et expédié, le train réservé au transport de la ménagerie est, paradoxalement, le dernier à être déchargé. Premier chargé car la ménagerie déserte le site occupé par le cirque avant même la fin de la dernière représentation en cours, dernier déchargé car son transfert sur le site exige que la tente qui doit l’abriter soit préalablement montée. En fait, c’est avec l’arrivée du train n° 3 que débutent les opérations de débarquement. Tandis que les ouvriers préposés au repérage des lieux où doivent s’élever les tentes (les « jalonneurs ») se hâtent vers les omnibus chargés de les conduire sur site, les palefreniers s’occupent à faire descendre les chevaux de trait des wagons. Tout comme tous les autres quadrupèdes du cirque ceux-ci profitent de rampes déployées perpendiculairement aux voies. A l’exception des éléphants qui s’exécutent seuls, sans autre recours que leur force physique. Afin de gagner du temps, les chevaux de trait débarquent tout harnachés, regroupés par deux, quatre ou six. Attelés par deux, ils aident au débarquement des différents chariots qu’ils remorquent à l’exemple des péniches le long des canaux, à commencer par ceux portés par les trains n° 2 et 3, puis le train n° 4 et enfin les cages roulantes du train n° 1. Tout a été minutieusement pensé : « Pour faciliter le débarquement, Barnum a fait construire ses trucks très bas. A l’extrémité du premier truck ont été apposés deux plans inclinés, bordés de ridelles, solidement ferrés et soutenus par un tréteau. Deux chevaux tirent la voiture placée sur le wagon : les roues viennent s’emboîter sur les plans inclinés, et le lourd chargement descend, maintenu quelque peu en arrière par un câble. Pour passer du deuxième wagon au premier, on place entre eux deux grosses plaques de fer qui servent de pont sur lesquelles les voitures roulent ; et l’opération précédente est recommencée (La Mayenne, 1er juillet 1902). Une fois au sol, les chariots sont repris par un nouvel attelage pour être conduites sur le site. Certains chroniqueurs rapportent qu’en cas d’arrivée tardive des trains, les fourneaux des roulantes sont allumés avant même leur déchargement afin de pouvoir servir au personnel les premières collations dans le temps imparti. L’ensemble des opérations de débarquement ne dure guère plus de deux heures.
Les wagons-dortoirs attisent la curiosité : « Ce sont d’immenses sleepings ; mais chose curieuse très peu larges, et cela à cause de l’étroitesse des chemins de fer anglais sur lesquels ils sont habitués à voyager. Ces voitures contiennent deux rangées de couchettes superposées [trois par trois] avec, au milieu, une allée où l’on a peine à passer un de front » (Le Gaulois, 24 mars 1902). Leur confort laisse dubitatif : « Sur la voie parallèle à la ligne de Paris, étaient garées [en gare de Rennes] les voitures où reposaient les artistes. Nous pouvons jeter un coup d’œil sur l’une d’elles. Le système de couchage est celui des paquebots, les couchettes sont installées les unes sur les autres. Il doit faire épouvantablement chaud là-dedans, car les pauvres gens ont ouvert les fenêtres et dorment, la tête presque sortie de la voiture, sans souci des curieux qui passent et qui, quelquefois regardent dans l’intérieur des voitures, tout ce peuple dort sans s’inquiéter des manœuvres, sachant qu’il ne doit être debout que pour le lunch de 10 heures à la tente salle à manger » (L’Ouest-Eclair, 28 juin 1902). C’est toujours mieux que les gardiens de la ménagerie « simplement étendus sur un peu de foin dans le wagon de tête » (La Mayenne, 1er juillet 1902). Les glaces des fenêtres des wagons-dortoir « sont recouvertes d’un enduit blanc qui les rend opaques. Il n’y a que quelques voitures pourvues de rideaux ou de stores » (Le Temps, 29 mars 1902).
Cette remarque confirme les assertions de la presse qui laissent à penser que les wagons-dortoir soient le lot du personnel d’exécution, les artistes et le personnel d’encadrement bénéficiant de wagons « d’un luxe qui éveille vaguement l’idée de nos trains présidentiels » (La Mayenne, 1er juillet 1902). Invité à accompagner le train n° 4 de Paris à Lyon, l’homme de lettres Joseph Galtier témoigne de leur aménagement : « « La chambre qui m’est destinée […] n’a rien de commun avec nos cabines de sleeping ordinaire. Elle est carrée et assez grande ; elle est meublée d’une commode anglaise, d’une table pliante ; deux lits superposés y sont préparés ; l’un est à deux places, l’autre […] se rapproche des couchettes des wagons-lits » (Le Temps, 29 mars 1902). Sa « cabine » est contiguë à celles des phénomènes de Barnum. Interrogé par J. Galtier sur ses conditions de voyage, l’homme-télescope se plaint de l’absence d’intimité liée à son célibat : « Il y a les compartiments pour les femmes seules, les compartiments pour les couples, enfin ceux pour les hommes seuls. L’assommant c’est que nous sommes obligés de coucher deux par deux. »
Citons enfin le wagon-salon réservé à J. A. Bailey, attelé au « sleeping » des phénomènes : « Le directeur à son wagon privé, rapporte J. Galtier, très confortablement aménagé, où il habite presque toute l’année. C’est une roulotte de luxe sur rails : cuisine, salle à manger, salon, trois chambres, salle de bains, plus deux chambres pour les domestiques. »
Le rembarquement à bord des trains attire autant l’attention. La presse insiste, là aussi, sur la rapidité et l’efficacité de cette opération qui commence avant même la fin de la représentation du soir. Gaspar Galy a laissé un récit détaillé de cette opération au départ de Marseille, depuis le champ de manœuvres du rond-point du Prado jusqu’à la gare du même nom (Le Petit Marseillais, 23 avril 1902). A 18 h, précise-t-il, à peine le repas des ouvriers et des artistes terminé, commence le démontage de la tente du réfectoire et celui des cuisines qui, chargées sur leurs fourgons respectifs, prennent sans attendre le chemin de la gare, accompagnées de la tente des écuries et de celle des ateliers. A 20 h, les voitures-guichets sont fermées. Dans le même temps, débute le démantèlement de la tente abritant l’estrade des phénomènes et la ménagerie : les premiers sont invités à descendre de leur estrade et les dromadaires, girafes, les zèbres et autres zébus regroupés à l’extérieur. Ils sont bientôt rejoints par les éléphants qui viennent d’achever leur numéro. La caravane animale peut s’ébranler, les cages des fauves prises en remorque en tête. A 21 h00, la toile, soutenue par les seuls mâts du centre et les piquets circulaires, est affalée et chargée. Ne reste debout que la grande tente, où le spectacle se continue, et les vestiaires des artistes. Dès que ceux-ci achèvent leur numéro, leurs costumes et accessoires sont aussitôt enlevés. La représentation terminée, les spectateurs sont frappés par le vide qui habite désormais les lieux. Le démontage des gradins et de la couverture se poursuit de 21 h 50 à 22 h 45 : « Soit 55 minutes pour une besogne de cette importance […]. Il est vrai de dire que le travail s’exécute au doigt et à l’œil, sans cris, sans interpellation, dans le silence le plus absolu […]. Les ordres se donnent au sifflet, soulignés seulement par quelques mots. » A 23 h 10 il ne reste plus rien sur le champ de manœuvres et à 0 h 15 les deux derniers trains encore en gare sont prêts à s’élancer pour Toulon, leur prochaine étape. Le premier est parti à 22 h, le second a été mis en marche à 23 h 30, le troisième a suivi à 0 h 30 et le quatrième à 1 h.
Les compagnies ferroviaires et de tramways profitent de l’engouement du public pour le « Greatest Show on Earth ». Mise en marche de trains supplémentaires au départ des communes limitrophes (jusqu’à 50 % de réduction sur l’aller et retour) pour les premières ; renforcement des services, voire augmentation des tarifs, pour les secondes. » Trains et tramways sont pris d’assaut. La gare de Saint-Quentin, ville où le cirque stationne les 23 et 24 septembre, enregistre ainsi 3 350 voyageurs le premier jour et 4 425 le deuxième jour, contre 300 à 400 en temps ordinaire. A Lyon, un service renforcé de tramways et d’omnibus est organisé du 30 mars au 10 avril afin d’assurer la desserte du parc de Bonneterre où se dresse le chapiteau : « La ligne Cordeliers-Villeurbanne commencera un service régulier à intervalle de deux minutes depuis 12 h 30 de l’après-midi jusqu’à minuit, tandis que la ligne Bellecour-Villeurbanne fera marcher des voitures toutes les cinq minutes à partir de 12 h 30 (après-midi) jusqu’à 11 h 12 du soir. Les tramways lyonnais doubleront leur service, tandis qu’une ligne spéciale d’omnibus sera ouverte entre la place des Cordeliers et le terrain du cirque. En tout il y aura plus de 350 voitures de tramways et d’omnibus qui circuleront entre la ville et l’emplacement de l’Exposition, ce qui garantira un moyen de transport commode et rapide à tout le monde qui voudra rendre visite à la plus grande des entreprises de ce genre » (Le Salut public, 30 mars 1902). A Marseille, les voitures de la Compagnie générale française des tramways (CGFT), qui assurent la desserte du rond-point du Prado, près duquel se tient le cirque, portent en lettres blanches l’indication « Cirque Barnum ».
En sept mois, de fin mars à fin octobre 1902, le cirque visitent sous chapiteau 106 villes françaises et 12 villes suisses. Les ultimes représentations se tiennent le dimanche 26 octobre à Dunkerque, retenue pour l’outillage de son port, notamment « une formidable grue qui est unique et peut enlever des colis de quarante tonnes » (Le Figaro, 7 octobre 1902). Suffisante pour charger les wagons sur les ponts et dans les cales des deux navires de l’Atlantic Transport Line, le Minneapolis et le Michigan, venus d’Angleterre. Premier arrivé, le Minneapolis est aussitôt placé sous la protection d’un cordon de cavaliers et de fantassins, la ville étant confrontée depuis plusieurs jours à un violent mouvement revendicatif des dockers. Comme prévu, le transfert à bord débute le 27 :
« Lundi, dès huit heures et demie du matin, la longue file de voitures, suivie des éléphants, arrivait au port. La ménagerie et la plus grande partie du personnel devaient seules s’embarquer sur le Minneapolis. L’embarquement a commencé à neuf heures et s’effectue sans difficulté à l’aide de la grue du navire, de dimensions ordinaires. L’opération s’est continuée dans la nuit du lundi au mardi, et l’on espère que le Minneapolis quittera Dunkerque dans la journée du mercredi [le 29], vers le soir, au plus tard. Quand cet immense vapeur aura disparu à l’horizon, le Michigan, jaugeant 14 000 tonneaux, prendra sa place et c’est alors que sera opéré le plus gros de l’embarquement : le matériel roulant, c’est-à-dire les wagons spécialement construits pour les voies européennes, et ces magnifiques chevaux du Texas [les chevaux de trait], tant admirés pour leur inlassable énergie. La puissante grue à vapeur du port dunkerquois enlèvera les lourds wagons que chacun connaît. C’est donc jeudi soir [le 30], ou vendredi au plus tard, que l’immense cirque aura quitté définitivement notre continent » (Le Grand écho du nord de la France, 30 octobre 1902).
En vérité, le Michigan ne quitte le port de Dunkerque pour l’Angleterre et, de là vers New-York, que le samedi 8 novembre. Lors de son escale londonienne, voitures et wagons sont débarqués pour être garés à Stoke-on-Trent en prévision d’une prochaine tournée, qui n’aura pas lieu. La plupart des matériels serviront cependant au Wild West Show de Buffalo Bill Cody, qui, passé sous la direction de Barnum, parcourra l’Angleterre et l’Europe de 1903 à 1906. Derniers feux avant leur dispersion, vendus pour les uns, démantelés pour les autres.
Les étapes du cirque Barnum & Bailey
Après avoir hiverné à Paris du 30 novembre 1901 au 23 mars 1902 (Galerie des Machines au Champ-de-Mars), The Greatest Show on Earth sillonne toute la France du 30 mars au 26 octobre, visitant pas moins de 118 villes, compris une courte incursion en Suisse.
Mars
Lyon, du 30 mars au 10 avril
Avril
Valence, le 11 [représentations annulées, pluie]
Marseille, du 12 au 21
Toulon, du 22 au 24
Nice, du 25 au 27
Draguignan, le 28 [représentations annulées, pluie]
Arles, le 29 [représentations annulées, pluie]
Avignon, du 30 au 1er mai [représentations du 30 annulée, mistral]
Mai
Alès, le 2
Nîmes, les 3 et 4
Montpellier, les 5 et 6
Sète, le 7
Narbonne, le 8
Perpignan, le 9
Béziers, les 10 et 11 [représentation du 11 au soir annulée, désordres]
Carcassonne, le 12,
Castres, le 13,
Albi, le 14
Toulouse, du 15 au 18
Montauban, le 19,
Agen, le 20.
Bordeaux, du 21 au 28 [représentation du 21 au soir annulée, retards des trains]
Périgueux, le 29
Brive-la-Gaillarde, le 30
Limoges, du 31 au 1er juin
Juin
Angoulême, le 2
Saintes, le 3 [représentations annulées, terrain imbibé d’eau]
Rochefort, le 4
La Rochelle, le 5
Niort, le 6
Poitiers, les 7 et 8
Châtellerault, le 9
Tours, les 10 et 11
Saumur, le 12
Cholet, le 13
Angers, les 14 et 15
Nantes, du 16 au 18
Saint-Nazaire, le 19
Vannes, le 20
Lorient, le 21
Quimper, le 22
Brest, les 23 et 24
Saint-Brieuc, le 25
Rennes, les 26 et 27
Saint-Malo, le 28
Fougères, le 29
Laval, le 30
Juillet
Le Mans, les 1er et 2
Alençon, le 3
Lisieux, le 4
Caen, les 5 et 6
Evreux, le 7
Chartres, le 8
Orléans, les 9 et 10
Montargis, le 11
Sens, le 12
Auxerre, le 13
Troyes, les 14 et 15
Chaumont, le 16
Dijon, les 17 et 18
Besançon, les 19 et 20
Lons-le-Saulnier, le 21
Bourg-en-Bresse, le 22
Mâcon, le 23
Châlons-sur-Saône, le 24
Le Creusot, le 25
Nevers, le 26
Bourges, les 27 et 28
Châteauroux, le 29
Montluçon, le 30
Moulins, le 3
Août
Thiers, le 1er
Clermont-Ferrand, les 2 et 3
Vichy, le 4
Roanne, les 5 et 6
Saint-Etienne, du 7 au 10
Chambéry, le 14 août.
Genève, du 15 au 18
Lausanne, les 19 et 20
Fribourg, le 21
Biel, le 22
La Chaux-de-Fonds, les 23 et 24
Berne, les 25 et 26
Lucerne, le 27
Zurich, du 28 au 31
Septembre
Saint-Gall, les 1er et 2
Winterthur, le 3
Schaffhausen, le 4
Bâle, du 5 au 7
Belfort, le 8
Epinal les 9 e10
Lunéville, le 11
Nancy, du 12 au 14
Bar-le-Duc, le 15
Châlons-sur-Marne, le 16
Verdun, le 17
Sedan, le 18
Charleville-Mézières, le 19
Reims, du 20 au 23
Compiègne, le 23
Laon, le 24
Saint-Quentin, les 25 et 26
Lille, du 27 au 1er octobre
Octobre
Roubaix, du 2 au 4
Maubeuge, le 5
Valenciennes, le 6
Cambrai, le 7
Douai, le 8
Arras, le 9
Amiens, du 10 au 12
Beauvais, le 13
Rouen, du 14 au 16
Le Havre, du 17 au 19
Dieppe, le 20,
Abbeville, le 21
Boulogne, les 22 et 23
Calais, les 24 et 25
Dunkerque, le 26
[1] Le 6 juillet 1901 au matin, en gare de Beuthen (Haute Silésie), le train n° 2, déjà garé, est pris en écharpe par le train n° 3 arrivé trop vite. D’abord évoquée, la défaillance du frein à air comprimé est vite abandonnée, la faute incombant entièrement à une erreur du mécanicien. L’accident fait deux victimes (William Smith, responsable des palefreniers, et John Wilton, cocher personnel de JA Bailey) et sept blessés. Il est également fatal à dix chevaux et poneys.
[2] L’installation de chauffage comporte deux immenses chaudières placées à l’extérieur du palais du côté de l’avenue de la Motte-Picquet. La chaleur est distribuée par un système de tuyaux alimentant des radiateurs placés dans toutes les parties du bâtiment.
[3] Erreur, le matériel ferroviaire du cirque a été construit en Angleterre, l’encombrement des voitures et wagons américains étant incompatible avec le gabarit anglais.
[4] Plus exactement le vaste faisceau de voies aménagé au pied de la Tour Eiffel pour les besoins de l’Exposition de 1900.
[5] Arrivé en gare de Lyon-le-Part-Dieu dans l’après-midi du 24, le cirque ne donnera ses deux premières représentations que le dimanche 30, et pour douze jours.
[6] Créés en 1796 au niveau des cantons puis des communes, les Bureaux de bienfaisance avaient pour mission de venir en aide aux indigents, orphelins et malades. Pour ce faire, ils étaient autorisés à percevoir une taxe sur certaines activités récréatives, notamment les spectacles.